Les conséquences d'une césarienne pour la mère

La césarienne, souvent présentée comme un moyen simple, rapide et sans difficulté de faire naître son enfant, peut en fait avoir des conséquences à court et à long terme, aussi bien pour la mère que le bébé.

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Risque d'infection de site opératoire (infections nosocomiales)

Comme après tout opération, le risque d'infection de site opératoire est présent. En France, les infections nosocomiale font l'object d'une surveillance particulière par l'Institut de Veille Sanitaire (INVS)[1], et plus particulièrement par le Réseau d'Alerte, d'Investigation et de Surveillance des Infections Nosocomiales (RAISIN) [2]. Les césariennes font partie des opérations suivies par ce réseau.

L'incidence moyenne des infections de site opératoire post-césarienne était en 2006 de 1,9% en général, 1,6% pour les césariennes à bas risque infectieux, et de 1,37% pour les césariennes à bas risque infectieux et programmées [3], avec une nette tendance à la baisse depuis 1999.

Cependant il semble difficile de généraliser ce chiffre à l'ensemble des maternités françaises, car :

  • Les résultats sont très variables : si on considère l'incidence globale pour les patientes à bas risque, un quart des maternités déclarent un taux d'infections inférieur à 0,78%, et un quart des maternités déclarent un taux d'infections supérieur à 2,63%, le taux maximum déclaré étant de 10% (page 7). On passe donc très facilement du simple au quadruple. Il est probable que les pratiques locales influencent énormément le taux d'infection, et dans ce cadre, parler d'un taux moyen autour de 2% ne donne pas une information suffisante sur la situation réelle.
  • Les infections peuvent être des "infections superficielles" (plus des trois quarts des infections), des "infections profondes de l'incision", ou des "infections de l'organe ou du site", le plus souvent des endométrioses (page 9). Il est possible que certaines "infections superficielles", ne nécessitant qu'un traitement local, n'aient pas été correctement identifiées dans les statistiques. Pour les deux autres types, nécessitant une intervention médicale plus lourde, il semble plus difficile qu'elles échappent au suivi post-opératoire.
  • Seulement 13097 césariennes ont été évaluées en 2006, soit moins de 10% des césariennes réalisées cette année-là. Etant donné la grande variabilité d'un service à l'autre, on ne peut sans doute pas extrapoler ce chiffre à l'ensemble des césariennes.
  • Des études équivalentes dans d'autres pays donnent des taux d'infections nettement plus élevés : 8,3% en Norvège en 2009[4], 8,9% en Angleterre en 2008[5]. Même en 1999, le taux annoncé en France n'était que de 3,7% : peut-être les pratiques françaises en termes d'asepsie sont-elles meilleures depuis plusieurs années, peut-être est-ce indicatif d'un biais dans la manière dont les résultats français sont constitués.
    En particulier, la durée habituellement utilisée pour la recherche d'infections post-opératoires est de 30 jours. Dans RAISIN, seuls la moitié des patients, toutes opérations confondues, ont été effectivement suivis jusqu'à 30 jours (page 8).
    Plus particulièrement, un quart des infections, toutes opérations confondues, ne sont dépistées qu'après deux semaines, or un tiers des patients n'ont pas été suivis au delà de deux semaines. Il se peut donc que des infections, survenant chez des patients non suivis, aient été omises.

L'interprétation des statistiques sur les infections est particulièrement complexe, parce que :

  • Il n'est pas suffisant de ne s'intéresser qu'aux infections découvertes pendant le séjour à l'hôpital : seules 14% (Norvège[4]) ou 16% (Angleterre[5]) des infections sont dépistées lors du séjour à l'hôpital. Bien entendu, il faut pondérer ces chiffres en fonction des durées moyennes d'hospitalisation dans ces pays, par rapport à la France.
  • En cas d'infection, une ré-hospitalisation n'est pas systématique. Moins de la moitié des mères souffrant d'une infection non-superficielle sont ré-admises à l'hôpital[4]. Certaines publications ne se basent que sur les chiffres de ré-hospitalisations, ce qui donne de biens meilleurs résultats, il ne faut donc comparer que ce qui est comparable.
  • Les résultats sont extrêmement variables d'un établissement à l'autre, par exemple [5] indique des résultats allant de 2,9% à 17%.
  • Cette variabilité s'explique par le fait que prendre des mesures de prévention permet de réduire significativement le risque d'infections : par exemple division par 6 après la mise en place d'un ensemble de mesures d'asepsie[6]. Suivant les politiques mises en place au sein d'un établissement, on aura donc des résultats nettement différents.
  • L'utilisation systématique d'antibiotiques semble avoir un net effet préventif, réduisant de moitié le taux d'infections[7][8]. Cela fait partie des recommandations du CNGOF[9] depuis 2000. Le mode d'utilisation des antibiotiques semble également avoir un effet : un service a divisé par trois son taux d'infections en injectant les antibiotiques avant l'incision, au lieu de ne les injecter qu'après avoir coupé le cordon[10].

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Risques d'adhérences

Les adhérences sont un défaut de cicatrisation : au lieu que la peau cicatrise avec la peau, les muscles avec les muscles, etc, il se peut que certains plans cicatrisent ensemble, par exemple la vessie pourra se coller à la cicatrice de l'utérus.

Les adhérences peuvent provoquer une gène, ou passer totalement inaperçues et n'être détectées qu'au moment d'une nouvelle opération chirurgicale telle qu'une nouvelle césarienne. Environ 20% des césariennes itératives sont compliquées par des adhérences sévères, c'est-à-dire telles que le chirurgien doit les éliminer pour pouvoir procéder à l'opération[11]. Les adhérences se multiplient avec le nombre d'opérations chirurgicales, par exemple on trouve quasiment deux fois plus d'adhérences après deux césariennes qu'après une seule césarienne[12].

Voir aussi...

La SOGC a émis une directive clinique sur la prévention des adhérences en chirurgie gynécologique

Les adhérences péritonéales sur santepratique.fr

La formation d'adhérences semble être influencée par différents facteurs.

  • La technique de Misgav-Ladach semble générer moins d'adhérences détectées lors de la césarienne suivante que la technique de Pfannenstiel [13].
  • Le fait du suturer ou non le péritoine pourrait avoir une influence, mais ce point n'est pas clairement établi, par exemple [14] trouve plus d'adhérences péritonéales en cas de suture tandis qu'une méta-analyse[15] trouve moins d'adhérences en cas de suture. La formation des adhérences pourrait être lié à une réaction inflammmatoire autour de la suture[16].
  • Le fait d'effectuer une suture utérine en un plan pourrait augmenter le risque d'adhérences vessie/utérus[17].

Il est difficile d'isoler les facteurs de risques d'adhérences, en effet, le simple fait d'utiliser des gants non poudrés permettrait de réduire la formation d'adhérences[18][19].

Bouger peut aider à prévenir la formation des adhérences les plus externes (peau et muscle), car ainsi vous allez obliger les différents plans à se déplacer les uns par rapport aux autres. Vous pouvez également masser doucement la peau, en faisant des petits ronds. Un kinésithérapeute ou un ostéopathe pourra également travailler sur des adhérences plus profondes.

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Moins d'enfants par la suite

On constate une association entre une première césarienne et un plus faible nombre d'enfants par la suite. Cependant il ne semble pas possible d'expliquer cette association par des causes mécaniques liées à la césarienne.

Les mamans sembleraient plus fréquemment choisir de ne plus avoir d'enfants ou d'espacer les naissances après une césarienne ou une voie basse instrumentale, qu'après une naissance par voie basse simple [20] [21]. il est intéressant de noter que les mères, après une césarienne ou une voie basse instrumentale, expriment une peur de l'accouchement plus importante que les mères ayant vécu une voie basse simple [22].

Les mères ayant subi une césarienne et essayant de concevoir un enfant semblent mettre plus de temps : d'après [23], la probabilité de mettre plus d'un an à concevoir passe de 7% à 12% après une césarienne.

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Augmentation du risque de césarienne lors des grossesses ultérieures

Après une première césarienne, le risque d'accoucher par césarienne lors d'une grossesse ultérieure augmente.

Mode d'accouchement après une césarienne, données Audipog 2006

© Association Césarine

Mode d'accouchement après une première césarienne
données Audipog 2006

 

Audipog indique que en 2006, pour les mères vivant leur seconde grossesse, enceintes d'un seul enfant après une première césarienne,

  • environ la moitié des femmes ont subi une césarienne programmée ou une césarienne en urgence avant travail,
  • et sur la moitié qui ont tenté un accouchement par voie basse,
    • Les trois quart ont effectivement accouché par voie basse.
    • Un quart a subi une césarienne en cours de travail.

Au final, ce sont donc quasiment les deux tiers (61,8%) des mères ayant subi une première césarienne, qui ont subi à nouveau une césarienne.

Ces données sont du même ordre de grandeur que [25] qui indique que « Parmi les femmes ayant accouché en 2001 pour lesquelles un antécédent de césarienne(s) était signalé [...] 68,6% ont ainsi connu à nouveau [une césarienne]. »

Le taux de césariennes programmées s'explique partiellement par la crainte de la rupture utérine. Vous pouvez également consulter la page de ce site consacrée à l'AVAC.

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Augmentation du risque de placenta praevia / accreta lors des grossesses ultérieures

Le placenta praevia consiste en une localisation du placenta trop proche du col de l'utérus, recouvrant celui-ci, rendant ainsi le passage du bébé impossible. L'emplacement du placenta est systématiquement vérifié lors des échographies de contrôle de la grossesse (il ne faut s'inquiéter qu'à partir de la troisième échographie car le placenta remonte en cours de grossesse).

Le placenta accreta est un défaut de liaison entre le placenta et l'utérus : au lieu de rester en surface de l'utérus, le placenta va profondément s'y insérer. Au moment de la délivrance, il ne s'en détachera pas facilement, ce qui pourra provoquer une grave hémorragie nécessitant soit la ligature des artères irriguant l'utérus, soit l'ablation de celui ci, auquel cas il ne sera plus possible d'avoir d'autres enfants. Même dans le cas d'un traitement conservateur dans lequel la mère conserve son utérus, les suites de couches peuvent être très pénibles (saignements prolongés). Le placenta accreta est difficile à dépister.

Le risque de placenta praevia est augmenté en cas de césarienne, et si la mère présente un placenta praevia, il risque d'être également accreta, et ce d'autant plus que la mère a eu de nombreuses césariennes. A l'inverse, il semblerait que le risque de placenta accreta soit faible si le placenta n'est pas implanté sur la cicatrice (www.homebirth.org.uk).
 

Nombre de
césariennes
antérieures
Risque que le
placenta soit
praevia
Risque qu'un
placenta praevia soit,
en plus, accreta
Risque que le
placenta soit
praevia et accreta
0 0,26 % 5 % 0,013 %
1 0,56 % 24 % 0,134 %
2 1,8 % 40 % 0,72 %
3 3,0 % 47 % 1,41 %
4 10,00 % 67 % 6,7 %

source [26] . Voir également :

  • [27] qui trouve un risque 1,5 plus élevé de placenta praevia chez les patientes césarisées une fois, 2,5 fois plus élevé chez les patientes césarisées plusieurs fois, et un risque 35 fois plus élevé de placenta accreta chez les mères ayant un placenta praevia, si elles ont été césarisées.
  • [28] et [29] confirment l'augmentation de ces risques ;
  • [30] indique que « l'existence d'un utérus cicatriciel est associée à une morbidité plus importante du placenta praevia par comparaison avec des femmes avec placenta praevia sans antécédent de césarienne (...) : risque accru de transfusion sanguine (15% versus 32%), d'hystérectomie (0,7 à 4% versus 10%) de morbidité maternelle sévère composite (15% versus 23 à 30%). Ce sur-risque est majoré chez les femmes avec utérus multicicatriciel. »

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Augmentation du risque de décès in-utero (suspecté mais non prouvé)

Certaines études, en Ecosse et en Angleterre, notent une légère augmentation des risques de décès in utero lors d'une grossesse après une césarienne [31][32].

D'autres, aux Etats-unis et au Canada, ne notent pas de corrélation [33] [34]. En Allemagne, [35] rapporte même un taux plus faible de décès in-utero pour les mères ayant subi une césarienne, mais ce résultat paradowal pourrait s'expliquer par une surveillance plus attentive proposée à ces mères.

L'augmentation du taux de décès in-utero chez les mères ayant subi une césarienne est particulièrement sensible en fin de grossesse (risque x2 à 39 SA [31]). Ceci pourrait expliquer que les pays ayant une forte politique de césarienne élective pour cette seconde naissance (Canada, Etats-Unis), ne constatent pas d'augmentation de ce taux, le Royaume-Uni ayant une politique plus libérale à ce sujet.

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